Pour Spiral Dynamics, les nouvelles solutions amènent de nouveaux problèmes. Les êtres humains, en s’adaptant à leur environnement, modifient ce dernier et engendrent alors de nouvelles conditions de vie qui nécessitent l’émergence de nouvelles solutions, solutions qui modifieront à leur tour l’environnement, génèreront de nouveaux problèmes, et ainsi de suite. Mais avant que nous étudions tous ces mécanismes en profondeur, qui est donc ce mystérieux Spiral Dynamics ?
Spiral Dynamics, du livre à l’outil
Spiral Dynamics est un livre états-unien publié en 1996 par Don Edward Beck et Christopher C. Cowan. Ce livre propose une passionnante analyse évolutionniste du développement des sociétés humaines et des êtres humains. Cette analyse reprend l’idée d’un parallèle entre phylogenèse et ontogenèse, parallèle connu sous le nom de « théorie de la récapitulation ». Cependant, là où la théorie de la récapitulation traite uniquement de la biologie (la vie est apparue dans les océans et la phase fœtale des êtres humains se déroule dans du liquide) Spiral Dynamics s’intéresse aux cultures. Aux méta-cultures, pour être plus précis. Loin de se limiter à la simple théorie, Cowan (décédé en 2016) avait fondé une entreprise de formation pour les personnes « dont le succès dépend de la capacité à comprendre la nature humaine ». Le modèle s’applique à différentes échelles : développement personnel, entrepreneuriat et gestions des organisations, vie politique et géostratégie.
PARTIE I : Spiral Dynamics, une synthèse
Rendons à César ce qui lui appartient, Beck et Cowan furent les élèves de Clare W. Graves, docteur en psychologie et créateur original du modèle Spiral Dynamics. Graves s’est lui-même appuyé sur les travaux de Richard Dawkins et sur le concept de mème introduit par ce dernier dans Le gène égoïste.
a. Petit rappel de mémétique
Dawkins a conçu le mot « mème » en combinant les mot gène et mimētḗs, (du grec ancien μιμητής). Un mème est « un élément d’une culture ou un élément d’un système de comportements qui se transmet d’un individu à l’autre par imitation ou par un quelconque autre moyen non-génétique » (Oxford English Dictionnary : « an element of a culture or system of behaviour passed from one individual to another by imitation or other non-genetic means”).
Bien que Le gène égoïste ait été publié en 1976, il a fallu quelques années supplémentaires à la mémétique pour s’établir en tant que discipline. La notion de mème a ses détracteurs, Si vous désirez en apprendre un peu plus sur les critiques qui lui sont adressées, la page anglophone de Wikipédia est un bon début.
b. Une méta mémétique ?
Ce qui est particulier avec Spiral Dynamics, c’est que Graves a établi une cartographie de supposés méta-systèmes de valeurs qu’on retrouverait dans l’évolution des sociétés humaines aussi bien que dans le développement psycho-social des individus. J’emploie l’adjectif « supposés » par rigueur intellectuelle, mais pour ma part j’adhère à 98 % du modèle proposé dans Spiral Dynamics. Par souci de fluidité je vais donc abandonner le conditionnel à partir de maintenant. Que cela ne vous prive pas pour autant de votre esprit critique.
De même que tous les enfants connaissent une phase du « non » dite « phase d’opposition », (nous verrons d’ailleurs que ceci est cartographié par Spiral Dynamics) l’histoire de l’humanité voit se succéder au sein des sociétés humaines des systèmes culturels archétypaux. Vous pourriez être surpris voire choqués par cette affirmation au regard de la diversité des cultures humaines. Rappelons que ces systèmes sont des méta-systèmes de valeurs, appelés en Spiral Dynamics « v-memes ». Prenons un exemple simple, celui des croisades et de l’affrontement entre chrétiens et musulmans pour la possession de Jérusalem. En apparence, ces religions sont fort différentes. Les chrétiens considèrent Jésus comme le messie alors que pour les musulmans il est un simple prophète. L’islam proscrit la consommation du cochon, pas le christianisme. L’islam interdit la représentation du prophète Mohammed, les églises orthodoxes et catholiques sont emplies de sculptures, vitraux et tentures représentant la vie de Jésus. Bref, avec de telles différences, pas étonnant que les deux monothéismes se fassent la guerre (sans parler des dimensions politiques extra-théologiques de ces affrontements).
Changeons maintenant de perspective pour étudier la situation à un niveau méta. L’islam et le christianisme de l’époque affirment tous deux l’existence d’un dieu unique et omniscient à l’origine du monde. Ils partagent l’idée d’une vie après la mort, une vie éternelle qui se déroulera soit au paradis pour les vertueux soit en enfer pour les pécheurs. Cette menace et cette promesse relatives à l’au-delà servent de canevas à un code moral dans lequel l’impulsivité est condamnée (condamnation sélective quand on voit comment le viol est « sanctionné » aux Émirats Arabes Unis).
Si l’on compare maintenant ces deux monothéismes avec une autre religion, par exemple le polythéisme gréco-romain, on découvre qu’elles ont bien plus en commun que les apparences ne le laissaient préalablement penser. Il y a bien plus de différences entre le panthéon antique peuplé de divinités impulsives et la morale répressive véhiculée par les monothéismes chrétien et musulman. Ironie historique, les croisades sont avant tout l’affrontement de cultures appartenant au même méta-système de valeurs, au même v-mème.
c. Les conditions de vie influencent les cultures
Avant de rentrer dans la présentation détaillée des méta-systèmes de valeurs (v-mèmes) conceptualisés dans l’ouvrage Spiral Dynamics, abordons les piliers théoriques du modèle. Spiral Dynamics repose sur trois grandes idées. La première, c’est que les conditions de vie influencent les cultures humaines et les individus. Si j’évolue dans un environnement violent où mon intégrité physique et mentale est sans cesse mise en danger (prison, favela, zone de guerre) mon état d’esprit sera fort différent de ce qu’il pourrait être si mon quotidien se déroule dans une start-up de la Silicon Valley, dans une administration française dysfonctionnelle comme Pôle Emploi ou dans une banque d’investissement comme Goldman Sachs.
Vous pourriez nous faire remarquer que si une personne qui travail chez Goldman Sachs se retrouve en prison – par exemple pour des malversations – elle va soit être complètement dépassée par le changement d’environnement, soit révéler une part de violence tout à fait adaptée à la loi de la jungle. Vous avez tout à fait raison et nous y reviendrons. Toujours est-il que si les conditions de vie impactent directement le prisme psychologique à travers lequel sociétés et individus perçoivent le monde, les cultures et les modes de vie impactent leur environnement en retour. La révolution industrielle et le taylorisme fournissent une parfaite illustration de ce point. Le travail à la chaîne a fait exploser la productivité en même temps qu’il a dépossédé de leur liberté les artisans devenus ouvriers*. L’impact écologique des sociétés humaines atteint un point sans précédent. Bullshit jobs, burn-out et brown-out se multiplient tels les emplois fictifs dans les rangs d’un parti politique et forment un terreau tristement fertile à la dépression et au mal-être. Ce qui génère à son tour l’apparition de nouvelles manières de manager, d’entreprendre et de penser la vie en société. « New solutions bring new problems » disait Clare W. Graves.
* sur ce point lire le passionnant Liberté & Cie de Isaac Getz et Brian M. Carney, en particulier le chapitre « Des artisans aux automates ».
d. Le balancier des adéquations
Le cycle fonctionne donc ainsi : conditions de vie → méta-système de valeurs → altération des conditions de vie → émergence d’un nouveau méta-système de valeurs ou régression vers le système antérieur. Ainsi, face à l’obsession du profit comme seul horizon sociétal incarné par le capitalisme façon Reagan, nous observons d’un côté l’essor de notions comme le développement durable ou l’entrepreneuriat éthique, mais aussi la tentation historiquement régressive vers des idéologies marxistes ou nationalistes voire qui combinent les deux.
Ce qui m’amène à aborder un deuxième pilier théorique de Spiral Dynamics : les méta-systèmes de valeurs se divisent en deux catégories et s’alternent selon un mode de balancier. En effet, les deux grandes familles de v-mèmes sont les systèmes favorisant l’expression individuelle (self-express v-memes ou Individual/Elite v-memes) ou au contraire prônant la répression des individualités au bénéfice du groupe (self-repress v-memes ou Communal/Collective v-memes). L’alternance des méta-systèmes de valeurs obéit à la loi suivante : à un système self-express succède toujours un système self-repress et réciproquement.
Pour plus de clarté nous reviendrons sur ce point une fois les différents méta-systèmes présentés, mais gardez en tête que tout le monde n’est pas égal en matière d’évolution. Cela peut choquer celles et ceux qui adhèrent à l’idéologie relativiste en vertu de laquelle toutes les cultures se valent, mais en regardant le monde à travers le prisme de Spiral Dynamics il est évident que toute les sociétés ne se trouvent pas au même niveau de développement. Il en va de même pour les humains. Ce qui me permet de tout de suite préciser ce point fondamental dans la théorie de Spiral Dynamics : les auteurs essayent d’aborder chaque méta-système de valeurs de façon objective, en mettant les jugements moraux de côté. Un méta-système n’est pas meilleur que les autres dans l’absolu, il est adapté ou non aux conditions de vie. Ce qui était une réussite adaptative dans un contexte donné (un établissement pénitentiaire par exemple) devient inadapté dans un autre (une start-up de San Francisco).
e. Spiral Dynamics, un système ouvert
Avant de présenter en détail chaque méta-système – c’est le but principal de cet article – rappelons enfin que Spiral Dynamics postule que l’enchaînement des v-mèmes ou méta-systèmes de valeurs est un système ouvert. Puisque les conditions de vie influencent les cultures qui elles-mêmes modifient leur environnement en retour, puisque « new solutions bring new problems », chaque nouveau v-mème amènera tôt ou tard individus et sociétés à évoluer vers un v-mème ultérieur. A moins d’arriver un jour à la situation d’un environnement figé pour l’éternité que nos méta-systèmes de valeurs ne transformeraient plus, il n’y aura jamais de fin au changement. Spiral Dynamics est donc un système ouvert.
Ultime précision : si le système est ouvert, ni les individus ni les sociétés ne sont à égalité. Certaines personnes et certains groupes restent bloqués dans un v-mème en dépit du pic de dysfonctionnement atteint. La Corée du Nord en est un excellent exemple. Et maintenant, attelons-nous à ce qui me passionne dans cette théorie, à savoir les caractéristiques de chaque méta-système.
Partie II : les v-mèmes, méta-systèmes de valeurs
Chaque v-mème est désigné par une couleur. Initialement Clare W. Graves désignait les différents conditions de vie liées à chaque système par un couple de lettre, A-N, B-O, etc. Cette notation étant particulièrement aride, les auteurs ont fait évoluer le modèle et symbolisent désormais les systèmes self-express par des couleurs chaudes tandis que les systèmes self-repress sont symbolisés à des couleurs froides. Vous trouverez entre parenthèses la notation originale de Graves. Cette notation présente l’avantage de ne pas nécessiter de traduire le nom du méta-système, contrairement à la notation couleur. Par souci de fidélité (et par snobisme, je l’avoue), chaque couleur est mentionnée dans la langue de Shakespeare dans le titre du paragraphe qui lui est consacré. Dans le corps du texte, j’alterne librement les termes anglais et français.
BEIGE (A-N)
Le v-mème BEIGE serait apparu il y a environ 100 000 ans. J’emploie ici le conditionnel car depuis la parution de Spiral Dynamics en 1996 la paléontologie a fait de nouvelles découvertes, notamment l’existence de Homo floriensis en 2003. Cette date d’apparition présumée est donc sujette à caution. Voici comment les auteurs décrivent ce v-mème :
– Automatic, autistic, reflexive
– Centers around satisfaction of biological needs
– Driven by deep brain programs, instincts, and genetics
– Little awareness of self as a distinct being (undifferentiated)
– Live ‘off the lands’ much as others animals
– Minimal impact on or control over environment
Il n’existe aujourd’hui aucune société humaine qui serait organisée autour de ce v-mème. Dans un entretien de 2002 avec la magazine What Is Enlightment ?, Don Edward Beck explique que les seuls groupes d’individus où BEIGE est encore actif dans sa forme non-altérée se « cachent » en Indonésie et dans certaines régions de l’Afrique. Cependant, nous avons tous une expérience de ce méta-système à notre niveau individuel, puisque nous sommes si je puis dire « livrés » avec. Le fonctionnement des nourrissons et des très jeunes enfants (pendant les 15 premiers mois) peut donner une idée de ce donne BEIGE lorsqu’il est le v-mème majoritaire.
Conditions de vie, encore et toujours !
C’est l’occasion ici de rappeler l’importance de l’environnement dans l’expression et l’adaptation (ou l’inadaptation) des v-mèmes. Le parallèle entre le BEIGE des groupes humains arpentant une nature sauvage il y a 100 000 ans et un nourrisson naissant en zone francophone en l’an 2000 a ses limites. Sauf à venir au monde dans les zones les plus pauvres de la planète ou celles venant de subir une catastrophe naturelle, les conditions de vie ne sont pas comparables. Les nouveaux nés et plus tard les personnes souffrant de démence sénile ou d’Alzheimer vivent une expérience du monde centrée sur l’instant présent, sur les besoins physiques. Manger, boire, déféquer, dormir, le tout avec une conscience de soi limitée. Néanmoins, peut-on comparer cette expérience avec la vie d’adultes disposant de leur pleine motricité au Paléolithique moyen puis au Paléolithique supérieur ? Pas tout à fait.
Une notion fondamentale du modèle Spiral Dynamics est que, bien que nos vies soient dominées par un v-mème couplé à un autre, par exemple bleu/ORANGE pour la France, les précédents v-mèmes existent toujours au sein des individus. Ainsi, notons que notre BEIGE, celui avec lequel nous avons été livrés à la naissance, peut se réactiver dans certaines conditions. Un état de choc après une attaque terroriste ou un grave accident de voiture, c’est peut-être votre BEIGE qui court-circuitera toute la construction psycho-sociale qui forme votre personnalité quotidienne. On peut d’ailleurs constater que les gens contraints de vivre dans la rue – désolé, le terme « SDF » me paraît trop bureaucratique – régressent parfois en BEIGE. Horizon temporel restreint, « cueillette » de nourriture parmi les déchets et mendicité, absence totale de sécurité la nuit, ce sont finalement des conditions de vie propices à une résurgence de BEIGE.
En raison de la faible individualité inhérente à ce v-mème, intéressons-nous à celui qui lui succède si rien n’empêche le développement du groupe / de la personne. C’est avec VIOLET que les choses sérieuses commencent.
PURPLE (B-O)
– Obey desires of the mystical spirits beings
– Show allegiance to elders, custom, clan
– Preserve sacred places, objects, rituals
– Bond together to endure and find safety
– Live in an enchanted, magical village
– Seek harmony with nature’s power
Le v-mème VIOLET, premier méta-système Communal /Collective (self-repress) à apparaître dans le développement humain, est la matrice de tous les autres systèmes self-repress qui suivront. Ouvrez n’importe quel classique de l’ethnologie et vous trouverez du VIOLET. Les sociétés abordées par Margaret Mead dans son incontournable Mœurs et Sexualité en Océanie, par Claude Lévi-Strauss dans Tristes Tropiques, par Philippe Descola ou Pierre Clastres, toutes sont imprégnées de ce v-mème.
Tabous, superstitions, chamanisme, animisme totémique, sortilèges et traditions immuables interdisant l’innovation, c’est le monde magique – le village magique plus précisément – dans lequel baignent les populations structurées autour de VIOLET. Ce qui implique aussi que, lorsque vous allez voir un épisode de la saga Harry Potter au cinéma ou que vous décidez de relire Le Seigneur des Anneaux de JRR Tolkien, c’est à votre VIOLET personnel que vous donnez à manger.
Le clan et les gens du clan
En BEIGE, les humains ont peur de la foudre parce que l’éclair et le tonnerre sont incompréhensibles et tonitruants. En VIOLET, l’humain les craint parce qu’ils expliquent la colère de l’esprit de la Lune et que s’ils ne l’apaisent pas avec une offrande de manioc et l’immolation d’un bouc ce dernier nuira à la fertilité des récoltes ou au succès de la chasse.
Il est tentant de réduire VIOLET à la pensée magique au regard de l’importance que prend cette dernière au sein du v-mème. Certes, la pensée magique est consubstantielle de VIOLET, dans le cas chez l’enfant occidental qui croit au Père Noël comme dans le cas des Baatonous, Bokos ou Peuls pratiquant l’infanticide pour cause de superstition. Cependant, VIOLET porte avec lui une dimension que l’on retrouve aujourd’hui au cœur de l’occident et qui n’est pas étranger à tout un tas de problèmes familiaux ou sociétaux. Avec le développement de la conscience de soi et des représentations symboliques qui accompagnent l’émergence de VIOLET émerge aussi l’idée de Clan. VIOLET étant le premier méta-système Communal/Collective, l’appartenance au groupe y est fondamentale*. Les auteurs parlent d’ailleurs de tribal safety.
* Une fois encore, l’anthropologie classique s’est pendant longtemps consacrée à l’étude de cultures et d’ethnies qui avaient toutes VIOLET en commun. Les systèmes de parenté et les relations d’alliance par mariage, c’est le plus grand dada de cette anthropologie du siècle dernier au côté de la questions des mythes fondateurs. Et en effet, sous la domination de VIOLET, il est fondamental de savoir qui est le fils de qui, le frère de qui, etc. puisque l’identité de l’individu dépend de ses liens de parenté avec le Clan, la Tribu.
Ainsi, les membres du Clan sont les vrais hommes, tandis que les membres de groupes extérieurs sont tous regroupés dans la catégorie des « autres », des étrangers, voir du non-humains. C’est la graine fondamentale du racisme dans les cultures humaines, et plus largement le méta-système à l’origine de la xénophobie au sens de défiance envers ce qui est extérieur (au Clan). Les « vrais » japonais se distinguent des gaijins, les « personnes de l’extérieur » ; en cantonais les occidentaux sont appelés gweilo, littéralement « hommes fantômes » (en raison de leur peau pâle) tandis qu’en mandarin se sont des démons (guizi) ; les japonais et coréens ne sont pas en reste, qualifiés de « riben quizi » et « er guizi » ; , les roms se distinguent des « gadjé », les juifs se distinguent des goys ; les algonquins se désignent comme anishnabe (« les vrais hommes ») tandis que le mot « inuit » signifie « être humain » dans la langue inuit, etc. Ainsi, l’ethnicisme VIOLET est impliqué dans la plupart des conflits inter-ethniques (cf. le cas délicat des Balkans) même si l’évolution des sociétés humaines « modernes » fournit bien d’autres moteurs à ces antagonismes.
A un niveau plus individuel et occidental, PURPLE n’est probablement pas votre v-mème dominant mais il s’activera lorsque vous passerez le dimanche en famille ou partirez en vacances entre amis. Pour le meilleur et pour le pire : lorsque votre belle-mère fait irruption à votre domicile sans prévenir parce que « maintenant vous faites partie de la famille » , c’est une expression de son v-mème VIOLET. Lorsque vous célébrez le solstice d’hiver – plus connu sous le nom de Noël – avec vos amis ou en famille, c’est un moment de réactivation de VIOLET.
Notons avec amusement que la Force, dans l’univers de la trilogie Star Wars originale, est un concept fondamentalement VIOLET. Une énergie mystique qui nous lie tous les uns aux autres, et qui permet la télékinésie voire la prescience. Nul doute, la Force est magique. Or, beaucoup de fans de Star Wars reprochent à Georges Lucas son choix d’expliquer la Force sous un angle scientifique dans sa prélogie. Dans La Menace Fantôme, moment d’horreur cinématographique s’il en est, le concept auparavant ésotérique de la Force est remplacé par la présence mesurable de micro-organismes dans le corps, les midi-chloriens. Voilà que la Force relève de la biologie. C’est concret, ça se mesure, ça s’explique, et ça c’est bien une approche qui n’a pas nourri l’urgent désir de régression vers VIOLET que les fans voulaient s’offrir le temps de leur séance de cinéma.
RED (C-P)
– In a world of haves and have-nots, it’s good to be a have
– Avoid shame, defend reputation, be respected
– Gratify impulses and senses immediately
– Fight remorselessly and without guilt to break constraints
– Don’t worry about consequences that may not come
La transition entre VIOLET et ROUGE peut avoir plusieurs causes. Les cultures animistes – qui pouvaient cohabiter relativement paisiblement malgré leur ethnocentrisme – se retrouvent confrontées à des pénuries qui les poussent à envahir les territoires voisins. Les individus peuvent aussi constater que l’observation stricte des rituels ne produit pas les résultats escomptés. Si les récoltes ou les chasses sont mauvaises 5 années de suite alors que sacrifices et offrandes traditionnels ont été effectués, d’aucuns commenceront à douter de leur utilité. Il sera alors tant de défier les esprits totémiques des ancêtres et autres divinités animistes.
Chez les enfants évoluant dans des sociétés qui ont dépassé ROUGE depuis longtemps, la transition violet/ROUGE correspond à la célèbre crise des deux ans (« terrible twos »). ROUGE est un v-mème Individual/Elite et à ce titre marque la première vraie expression de l’individualité. Nous l’avons vu, en BEIGE l’expérience de vie est avant tout sensorielle, presque mécanique, et en VIOLET l’identité est avant tout collective, fondamentalement liée au groupe. ROUGE apporte avec lui impulsivité et affirmation de soi.
ROUGE est une étape nécessaire du développement de l’individu. Sans l’émergence de ROUGE dans l’histoire humaine, nos sociétés n’existeraient pas : nous serions encore des chasseurs-cueilleurs animistes. ROUGE apporte avec lui une forte tendance à la violence, mais le pendant positif de cette éruption de (recherche de) puissance est l’innovation. Dans les sociétés dominées par le méta-système VIOLET, il n’y a pas d’horizon évolutif. La norme consiste à respecter les traditions et à répéter le passé à l’identique, encore et encore. La rébellion ROUGE apporte du changement et permet aux individus de se libérer du conformismes.
Ne soyons pas dupes cependant. Historiquement, les sociétés fonctionnant en ROUGE sont inégalitaires et expansionnistes. Le monde s’y divise en deux catégories, les puissants et les autres (« the haves and the have-nots »). L’appétit de puissance implique des conquêtes. Insistons sur le fait que, contrairement à ce qui suivra avec les idéologies, ces conquêtes ne s’effectuent pas au nom d’une Vérité Ultime et absolue (le christianisme, l’islam, le communisme et autres « -ismes »). Les cultures dominées par le méta-système ROUGE dominent pour dominer, parce que l’honneur et la puissance y sont en eux-mêmes des finalités.
Les guerres intestines en Chine (période des Royaumes Combattants, période des Trois Royaumes), le fonctionnement de Spartes et Athènes (où la démocratie excluait 90 % de la population…), l’expansion de l’empire romain et avant elle la monarchie romaine, le royaume Hittite, la civilisation Maya, Mahomet réduisant ses prisonniers de guerre en esclavage, autant de cultures et de moments historiques exprimant le v-mème ROUGE C-P à l’échelle sociétale.
Les sociétés ROUGE s’appuyant sur une structure VIOLET, on y retrouve des formes de magies et de superstition, ainsi qu’un panthéon polythéiste. Les divinités de la Grèce Antique, avec leurs excès et leurs manigances, témoignent de cette évolution entre les esprits des cultes VIOLET et l’impulsivité anthropomorphique des divinités ROUGE. Cela ne signifie pas pour autant que toute forme de VIOLET a disparu : les romains rendaient culte aux pénates et à leur Lar familiaris. Plus prêt de nous, le culte des ancêtres si important en Chine relève de VIOLET.
Les vrais savent
Beck et Cowan qualifient ROUGE de v-mème égocentrique. Dans nos sociétés occidentales ayant dépassé le méta-système ROUGE ce dernier se manifeste sous forme de micro-sociétés : cour de récréation au collège et au lycée, gangs de rue, Hell’s Angels, vie en détention pénitentiaire, équipes sportives (même si dans ces cas là ROUGE n’a pas les plein pouvoirs, les joueurs ayant généralement intégré le méta-système suivant), groupes de rap. Le milieu du graffiti – je ne parle pas du street art reconnu qui est en passe de s’institutionnaliser mais du street art illégal – est dominé par l’affirmation de soi ROUGE : graffeurs et tagueurs marquent leur territoire en bravant la loi et l’insulte ultime consiste à recouvrir le tag ou le graff d’un autre.
A un niveau individuel, le ROUGE qui refait surface à l’adolescence restera plus ou moins présent au long de l’existence selon les individus. Relations sexuelles non protégées, ordalies adolescentes ou règlement de compte pour laver l’honneur de la famille expriment ROUGE. La sexualité BDSM, le sport en général, les arts martiaux et sports de combats en particulier ainsi que la créativité artistique sont l’occasion d’exprimer et d’utiliser ROUGE de façon constructive. De Prince à Pablo Picasso, de Mike Tyson à Rafael Nadal, du rugby à la musique punk, ROUGE est à l’œuvre pour notre plus grand plaisir.
BLUE D-Q
– find meaning and purpose in living
– sacrifice self to the Way for deferred reward
– bring order and stability to all things
– control impulsivity and respond to guilt
– enforce principles of righteous living
– divine plan assigns people to their places
Une fois de plus, le balancier des méta-systèmes de valeurs va osciller entre focus individuel et focus collectif. Après ROUGE apparaît donc un v-mème de type self-repress, BLEU. C’est l’apparition des idéologies à proprement parler, texte(s) fondateur(s) à l’appui.
En ROUGE, le pouvoir et la satisfaction de l’impulsivité étaient une fin en soi. Socialement, les sociétés ancrées en ROUGE vénèrent la puissance de leurs dirigeants. Du tyran autocratique (Tarquin le Superbe, Genghis Khan) à l’élite gouvernant en conseil (cf. Athènes ou Spartes), elles reposent sur une hiérarchie nette et ses have-nots sont esclaves ou serfs. Si idéologie il y a en ROUGE, elle se limite à la gloire et la puissance, la conquête pour la conquête. Cet expansionnisme produit certes des ères de prospérité grâce aux richesses amassées, mais engendre parallèlement l’oppression des territoires conquis ainsi que d’incessantes rivalités entre les chefs potentiels. Les jeux de pouvoir se font d’autant plus destructeurs lors des périodes de successions (cf. là encore l’exemple de l’unification compliquée de la Chine).
Le méta-système BLEU va donc prôner la répression de l’impulsivité caractéristique de ROUGE. En ROUGE on évite la honte, en BLEU on évitera dorénavant la culpabilité. Pour donner un cadre à la vie en société et à la vie tout court, rien de telle qu’une Vérité Ultime gravée dans la roche (les Tables de la Loi) ou imprimée dans un livre. Le Petit livre rouge (quelle ironie) de Mao Zedong, Le Capital de Marx, le Manifeste du parti communiste, Mein Kampf d’Adolf Hitler, le Coran, la Bible, la Constitution française, autant de textes sacrés porteurs d’une vérité universelle d’après leur(s) auteur(s). BLEU ne laisse pas de place au relativisme : la Vérité est Une et Indivisible.
La Vérité implique qu’il y a une bonne manière de faire les choses, et une mauvaise manière. Les mauvaises manières sont punies, et les bonnes seront récompensées… plus tard. Beaucoup plus tard. Là où VIOLET voit le futur comme l’exact reflet du passé puisque « nous avons toujours fait ainsi, telle est la coutume », là où ROUGE voit les choses à court terme en raison de son impulsivité, BLEU aborde le monde avec une perspective toute autre. L’horizon temporel de BLEU va jusqu’à l’éternité. Le monothéiste qui croit en un salut (et une damnation) éternel, la militante de Force Ouvrière qui affirme péremptoirement que « le communisme est le futur de l’humanité » ou le nationaliste qui jure fidélité à « la France éternelle » ont tous les trois un point commun : ils détiennent la Vérité et pour eux l’Histoire a un sens, un sens qui s’achemine inexorablement vers la réalisation de cette prophétie.
Je voudrais ici évacuer une ambiguïté : BLEU partage avec VIOLET le respect de la tradition. Cependant, le méta-système VIOLET n’implique aucun sens de l’histoire malgré ses mythes fondateurs. Les mythes VIOLET expliquent ce qui est maintenant, et ce qui est sera toujours. Ainsi, les Wayanas considèrent que le monde tel que nous le connaissons a été créé par les êtres – dieux ? – Kuyuli et Mopo. Mais ils appartiennent au passé et n’ont pas vocation à revenir pour accomplir une quelconque prophétie. Au contraire, pour le v-mème BLEU judéo-chrétien le messie reviendra à la Fin des Temps pour instaurer sur Terre le Royaume de Dieu. Pour le v-mème BLEU communiste, la dictature du prolétariat succédera à la révolution et engendra enfin le Communisme, horizon final de l’humanité.
De la stabilité aux œillères
Là encore, si choquant que cela puisse vous paraître, chaque v-mème possède ses avantages et ses inconvénients. Ce qui rend un v-mème pertinent, c’est son adéquation avec les conditions de vie. Au sortir de périodes dominées par ROUGE, BLEU présente le réel avantage de limiter les luttes intestines lors des successions. Comme on le dit dans les milieux gauchistes, « on peut tuer les révolutionnaires mais pas la révolution ». Qu’importe que les chefs de guerre se battent pour succéder au roi si la monarchie est désormais de droit divin. La république populaire de Chine et la France partagent ce point commun : en dépit des luttes souterraines au sein du parti unique (pour la Chine) et de chaque parti (pour la France), les dirigeants ne font que passer mais la grande nation, elle, demeure.
Chacun prenant sur lui – self-repress ! – pour éviter la culpabilité et servir le grand dessein supérieur, le climat devient propice à la paix sociale et au développement d’une élite intellectuelle. Par extension, former cette élite peut amener un relatif développement des sciences à condition que ces dernières ne remettent pas en cause le contenu du manuel sacré, du code écrit par le guide. Une société red/BLUE est différente d’une société BLUE/orange (on va y venir, patience) mais si le livre sain de BLEU affirme que « dieu créa l’homme a son image et qu’il a affermi l’orbe de la terre, qui ne sera pas ébranlé », les thèses de Copernic et Galilée vont rencontrer quelques problèmes.
J’avoue avoir la critique facile avec BLEU, ce v-mème étant une des raisons qui font que la France stagne loin derrière le Canada, la Suède ou le Danemark en matière d’intelligence politique et managériale. La rigidité administrative française est une manifestation de BLEU. Néanmoins, la rigueur intellectuelle m’oblige à rappeler que, si nous pouvons nous promener de façon relativement insouciante dans les rues de Londres ou Paris, c’est aussi parce que BLEU est passé par là. La majorité des habitants et des touristes de passage dans ces villes ont intégré que, non, on ne frappe pas les gens pour un regard, on ne les détrousse pas même si on est pauvre * et on ne les viole pas non plus pour le plaisir de les posséder ou de les humilier. C’est grâce à un BLEU hypertrophié que le Japon connaît si peu d’insécurité malgré les activités mafieuses qui s’y déroulent. C’est ce même BLEU qui fait que les salariés qui entrent dans une entreprise espèrent y travailler jusqu’à leur retraite. Sauf que le monde a continué d’évoluer.
*les derniers seront les premiers, voilà bien un conditionnement BLEU !
ORANGE E-R
– Strive for autonomy and independance
– Seek out ‘the good life’ and material abundance
– Progress through searching out the best solutions
– Enhance livingfor many through science and technology
– Play to win and enjoy competition
– Learn through tried-and-true experience
Vous avez maintenant compris le principe, BLEU étant un méta-système de valeurs Collective/Communal, c’est un v-mème Individual/Elite qui lui succède. La couleur ORANGE a été attribuée à ce nouveau v-mème.
BLEU a permis une stabilisation de la société, et avec elle un développement du savoir. Même si ce dernier est encadré par l’absolutisme moral inhérent à BLEU, la grandeur intellectuelle y est bienvenue tant qu’elle œuvre pour le rayonnement de la Vérité Ultime, traduisez « le rayonnement de notre culture ». Ainsi, la (relative) sécurité fournie par BLEU fut le berceau des universités médiévales. Encadrées par la papauté bien que la toute première – Bologne – fut l’initiative de particuliers, les universités fournissaient la licencia docendi qui permettait à tout professeur licencié d’enseigner à travers l’Europe.
L’apparition des universités médiévales est d’ailleurs parfaite illustration de l’impact des cultures sur les conditions de vie et des conditions de vie sur l’apparition de nouveaux v-mèmes. En effet, la prolifération des universités (et des cathédrales) en Europe était liée au développement des villes. Bologne comptait 50 000 habitants lors de la fondation de son université, population extraordinaire pour le moyen-âge. Pour résumer, le chaos qui suit la fin de l’empire romain d’Occident entraîne une baisse globale de la population et un exode urbain. Progressivement, l’amélioration des techniques agricoles déjà connues (soc, charrue, versoir, joug), le perfectionnement de la ferronnerie et l’exploitation de nouvelles terres (assèchement des marais et défrichement forestier) permettent une relative opulence. Les villes se développent alors à nouveau et deviennent des lieux privilégiés de commerce. S’en suit une boucle de développement démographique qui crée de nouveaux besoins : la ville a besoin de plus de métiers nécessitant une formation longue (juriste, médecin, notaire). C’est cette conjonction entre besoins et richesse qui sera le terreau fertile de l’université. Nous l’avons vu avec Copernic et Galilée, les progrès de la science sont encadrés par le dogme BLEU. En même temps, la durée des études implique elle-même d’avoir ce v-mème BLEU activé dans son système nerveux : l’impulsivité ROUGE ne permet pas exactement de mener à bien des études de médecine. Mais la rigidité de BLEU va progressivement générer l’insatisfaction chez les élites. Cette insatisfaction se manifestera à travers la philosophie des Lumières, soit sept siècles après la fondation de l’université de Bologne.
ORANGE remet l’individu au centre de la société, comme lorsque Locke et Rousseau affirment la liberté individuelle. Et comme ORANGE se veut rationnel le monde peut être mis en équations par la science, ce qui implique que la nature est contrôlable, domesticable par le progrès technique. C’est Diderot et D’Alembert compilant l’Encyclopédie pour instruire le peuple.
Vous connaissez forcément les manifestations du v-mème ORANGE, même si certaines vous sont désagréables. La révolution agricole, l’économie de marché, le taylorisme et le fordisme sont des manifestations du méta-système ORANGE. Libéré du joug de BLEU mais bénéficiant de la stabilité offerte par ce dernier, ORANGE peut se déployer. A nous la liberté d’entreprendre. ORANGE raisonne en termes d’opportunités. Son horizon temporel se raccourcit donc, passant de la gratification BLEU située dans un futur aussi lointain qu’hypothétique à des bénéfices tangibles à court et moyen terme. Cet opportunisme ne doit pas être confondu avec la myopie temporelle de ROUGE. En ROUGE on braque les banques, en ORANGE on fait de la spéculation boursière. Sous ROUGE on évite la honte, en ORANGE on évite d’offenser les puissants.
La Semaine de 4h de Tim Ferris, dont vous me savez grand fan, contient une bonne grosse dose de méta-système ORANGE. Ferris y explique par exemple comment il est devenu champion de boxe alors qu’il était loin d’être le plus athlétique… simplement en exploitant les règles. Sans tricher donc, mais en optimisant l’utilisation du règlement que ce soit lors de sa pesée ou lors de ses combats. C’est le même principe avec l’optimisation fiscale : l’optimisation n’est pas de la fraude, même si certaines personnes peuvent la trouver immorale depuis leur v-mème BLEU. Ou depuis leur v-mème VERT, mais nous y reviendrons. L’ORANGE de Ferris est particulièrement clair dans son précepte : « ne demandez pas la permission, demandez pardon ». Autrement dit, essayez des choses qui ne sont peut-être pas permises mais si on vous le fait remarquer soyez capable de faire machine-arrière, chose que ne sait pas faire ROUGE quand il est aux commandes.
Un autre lieu privilégié de manifestation ORANGE est le développement personnel productiviste. Tony Robbins, David Laroche, ou Olivier Roland sont archétypaux de cette vision du monde. Si vous le voulez vous le pouvez à condition d’utiliser la bonne méthode, et de préférence la leur. En BLEU il n’y a qu’une seule manière de faire les choses, en ORANGE il y en a plusieurs – ne serait-ce parce que l’individu est libre d’expérimenter – mais certaines sont plus efficaces que d’autres. Quand Oussama Ammar insiste sur l’importance qu’il y a pour l’entrepreneur à se demander si son business est scalable, c’est ORANGE. Quand des coachs en séduction filment leurs abordages de rue en caméra cachée pour prouver à leur client que leurs techniques sont field tested, c’est ORANGE. Les 48 lois du pouvoir de Robert Greene c’est encore ORANGE, et quand un dénommé Mathias Blinc vend le résumé audio du livre de Greene à 3 euros sur Amazon (sic) c’est ORANGE toujours.
Empowerment and poverty…
J’aime les langues pour les subtilités qu’elles portent en elles. Le mot empowerment n’a pas d’équivalent exact en français. ORANGE culmine dans la politique de REAGAN comme il culmine dans les caricatures de développement personnel évoquées plus haut. Pourtant, ORANGE est une étape nécessaire pour l’évolution des sociétés et des individus. Sans cette étape évolutive, nous n’aurions pas internet à notre disposition et nous ne pourrions même pas émettre l’ombre d’une critique envers nos dirigeants sans craindre une lettre de cachet. Vous le savez puisque vous me lisez, il existe un autre développement personnel, plus authentique et plus équilibré. Pourtant, sans ORANGE, sans La semaine de 4h de Tim Ferris, je ne serais pas en train d’écrire ses lignes. Je n’aurais jamais créé mon entreprise, trop occupé à exécuter docilement les plans prévus pour moi par mes parents et par l’éducation nationale.
Le risque d’un ORANGE déséquilibré pour les adeptes du développement personnel, c’est notamment la prison du faux-self. Les signes extérieurs de richesse, la trophy wife et le soin apporté au corps via la salle de sport sont caractéristiques d’ORANGE… tout comme la crise cardiaque de l’entrepreneur surmené* ainsi que l’absence de vie intérieure. A force de se considérer comme une entreprise, un empilement d’équations et de variables biomécaniques, reste-t-il de la place pour l’émotion et la sensibilité ? La PNL pratiquée par Tony Robbins dans ses séminaires est malheureusement typique de ce déni de la vie intérieure.
* notons que l’épuisement professionnel et les problèmes de santé au travail ne sont pas uniquement dû à la domination de ORANGE chez une personne ou une entreprise. D’autres v-mèmes peuvent avoir cet effet, BLEU par exemple (cf. le cas de la vie professionnelle au Japon) ou VERT, que nous traiterons après ORANGE.
Le déséquilibre d’un ORANGE dysfonctionnel impacte aussi les sociétés. Dans le monde globalisé qui est le nôtre, l’asymétrie des v-mèmes produit des crises qui sont elles-mêmes d’ampleur planétaire. Dans Spiral Dynamics, Cowan et Beck se livrent à une estimation du pourcentage de la population mondiale ayant accès à chaque v-mème. Plus subtile encore, ils fournissent un second chiffre : le pourcentage d’influence effective desdits v-mèmes. Cette estimation date de 1996 et les auteurs eux-mêmes préviennent de l’impossibilité de faire des statistiques rigoureuses. Il est toutefois intéressant de noter qu’ils estimaient alors que seul un tiers de l’humanité avait accès à ORANGE, mais que ce tiers avait la moitié du pouvoir mondial. Car en raison de sa rationalité et de son obsession pour l’optimisation, les cultures fonctionnant sous ORANGE disposent d’une supériorité technologique et marketing qui leur donne une grande influence sur leurs voisins. Des exemples l’impact du méta-système ORANGE à l’échelle mondiale ? Apple sous-traitant la fabrication de ses i-Phones chez les tortionnaires de Foxconn (ORANGE s’appuyant sur l’autoritarisme chinois BLEU). BP faisant le forage le plus profond du monde dans une ambiance d’incitation fiscale avec une Deepwater Horizon mal qui causera une déprédations écologiques. Les licenciements dit « boursiers » et les délocalisation d’entreprises pourtant rentables. Ce que Natixis appelle pudiquement « la déformation du partage des revenus en faveur des profits ». Liste non-exhaustive illustrant parfaitement la vision à court terme des sociétés et des individus percevant le monde à travers leurs lunettes ORANGE.
L’égocentrisme technologique sous-tendu par ORANGE explique donc ce paradoxe : le niveau de richesse mondiale augmente, et les inégalités augmentent aussi. Le partage des richesses n’est pas au coeur de la vision du monde ORANGE. Chacun est responsable de sa destinée dans un monde libre et rationnel, et l’opulence se conquit dans le respect de la loi. Toutefois, si on ne se fait pas attraper la loi peut se contourner. Notons que ORANGE ne saurait être le seul v-mème à blâmer face à l’état du monde. Il sait s’appuyer sur BLEU comme dans le cas de Foxconn ou celui des exportations de la démocratie (sic) étasunienne dans des pays riches en ressources naturelles.
GREEN F-S
– Explore the inner beings of self and others
– Promote a sense of community and unity
– Share society’s ressources among all
– Liberate humans from greed and dogma
– Reach decision through consensus
– Refresh spirituality and bring harmony
Après cette énumération d’impacts négatifs sur la santé des uns et l’environnement des autres, vous avez peut-être besoin d’air. Un air pur, non pollué. Si possible, un air qui respecte les droits humains. Voire, soyons fous, les droits des animaux. Bienvenue dans un univers… VERT.
ORANGE ayant eu le mérite d’apporter de l’opulence à l’humanité à défaut de l’apporter à chacun, d’aucuns vont alors considérer que nous avons largement de quoi subvenir à nos besoins collectifs. Et… ce n’est pas faux. Je n’ai rien d’un social justice warrior, mais j’ai été très marqué par le visionnage du documentaire We Feed The World. Ce qui est l’occasion pour moi de rappeler qu’en 2007 nous produisions déjà de quoi nourrir 12 milliards d’êtres humains.
VERT garde la rationalité matérialiste du v-mème ORANGE, mais bascule à nouveau vers le focus collectif. Ce basculement le rend parfois difficile à différencier de BLEU (nous y reviendrons). Son horizon temporel s’élargit : le développement durable y est aussi important que le bien-être immédiat des minorités et des laissés-pour-compte. La culpabilité BLEU évacuée par ORANGE fait son retour, sans pour autant reposer sur la promesse d’une vie après la mort ou d’une damnation éternelle. Mais vous êtes libres de croire en Jésus, Allah, Yahvé ou Bouddha, car VERT se veut inclusif… tant que vous ne vous opposez pas au mariage homosexuel.
Check tes privilèges… ou pas
Un des tremplins de la transition bleu/ORANGE vers orange/VERT est le sentiment de vide intérieur. Le yuppie abreuvé des livres de Zig Ziglar se demande progressivement « what’s the meaning of this ? ». L’avocat qui travaillait 72h par semaine se rend compte qu’il n’a pas vu ses enfants grandir et qu’il est un étranger pour eux. L’entrepreneur qui échappe à sa deuxième crise cardiaque entame une recherche spirituelle.
Sur le plan sociétal, l’émergence de VERT provient de l’incapacité du méta-système ORANGE à endiguer ses propres déprédations humaines et écologiques. Le mouvement hippie était une explosion de VERT, explosion vite réduit à néant par l’alliance de ORANGE et BLEU. Aujourd’hui, l’expression de VERT est facilitée par internet. L’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis a d’ailleurs cristallisé l’animosité de toutes les poches de VERT états-uniennes, la Californie en tête.
Comme tout v-mème, VERT n’est ni bon ni mauvais en soi, mais simplement adapté ou non à nos conditions de vie. J’écris ce texte en septembre 2017, et il est donc évident que VERT représente une étape encore futuriste pour toute une frange de l’humanité qui n’a pas encore intégré ORANGE (ce qui est aussi le cas de toute une partie de la population française, soit dit en passant). Il est également évident que le développement de VERT est nécessaire pour stopper les déprédations causées par l’hégémonie des v-mèmes ORANGE et BLEU sur la scène planétaire.
Néanmoins, comme tout v-mème qui se respecte, VERT a un versant fonctionnel et un versant dysfonctionnel. L’écriture inclusive, la Communication non-violente, le polyamour non dogmatique, l’architecture Linux et les logiciels open-source incarnent ce mélange entre recherche du consensus (la CNV, le polyamour) et mise en commun des ressources (le logiciel libre, les creatives commons). A l’autre extrémités du spectre VERT, on trouvé une intolérance d’autant plus toxique qu’elle s’exerce… au nom de la tolérance. Quand un militant prétendument intersectionnel affirme que le racisme anti-blanc n’existe pas au prétexte que le racisme « institutionnel » est blanc, quand une interlocutrice tente de disqualifier vos arguments à coup de « mansplaining » alors que vous contestez ses arguments en fonction de leur validité et non pas en fonction de son genre ou du vôtre, vous avez à faire à du VERT bien toxique. Cowan et Beck appelle cette forme dogmatique de VERT le « holier than you« . Une autre problématique liée à VERT est sa défiance envers les leaders. La recherche du consensus ralentit les processus de décisions. Ceci n’est pas un problème quand tout va bien mais dans un groupe qui fait face à une situation de crise, les conséquences peuvent être importantes. Enfin, j’évoquais plus haut le lien entre méta-système VERT et burn-out : les travailleurs sociaux et autres personnels de santé animés par un idéalisme VERT sont susceptibles de se ruiner la santé tant la misère du monde ressemble au tonneau des Danaïdes. Ainsi, en BLEU on se tue à la tâche pour l’intérêt supérieur de la nation ou de l’entreprise, en ORANGE on se tue à la tâche pour devenir riche, en VERT on se tue à la tâche parce qu’il y a encore tant à faire pour les dominé-e-s.
Un si joli VERT
La Communication non-violente de Marshall Rosenberg est un excellent exemple de VERT fonctionnel. Deux éléments en attestent. D’une part, Rosenberg répétait que, dans le cas où vous n’arriviez pas à trouver d’accord avec votre interlocuteur, « bonne nouvelle, si cette personne ne peut satisfaire vos besoins il en reste 7 milliards d’autres ». Autrement dit, le consensus n’est pas une obligation. Rappelons que la CNV n’a pas tant pour but de supprimer les conflits que de cesser de les alimenter. D’autre part, Rosenberg prévoyait l’usage de ce qu’il appelle « la force protectrice ». Si votre enfant s’apprête à renverser une casserole d’eau bouillante sur sa tête, pas le temps de vous lancer dans une conversation sur ses besoins et les vôtres, vous lui arrachez la casserole des mains et ensuite vous dialoguerez avec lui. C’est là que l’on voit à quel point Rosenberg n’était pas dogmatique*.
* je suis persuadé que Rosenberg avait accès au v-mème qui apparaît après VERT dans le modèle de Spiral Dynamics, mais c’est un sujet que j’aborderai dans un autre article.
Notons que l’attachement de VERT aux libertés individuelles découle directement du libéralisme ORANGE. Sans cette transition par ORANGE, BLEU ne pourrait accoucher du relativisme typique de VERT. C’est d’ailleurs une des différences entre la France et l’Angleterre quant à la question du communautarisme. L’idéal français d’intégration est fondamentalement BLEU, un BLEU qui entrave l’accès à ORANGE de beaucoup de citoyens et, par extension, leurs accès à VERT. En Angleterre, le communautarisme est parfaitement légitime en raison du v-mème ORANGE beaucoup plus développé : si les gens veulent rester entre eux, 1/ cela relève de leur liberté individuelle élémentaire, 2/ ce n’est en aucun cas un problème tant qu’ils contribuent activement à la vie économique du pays. Bien entendu, si votre vision du monde est majoritairement filtrée par VERT, vous pourriez légitimement penser qu’il s’agit de l’horizon indépassable du progrès humain. Ce n’est pourtant pas le cas.
Spiral Dynamics : conclusion provisoire
Nous avons présenté les v-mèmes dits « de subsistance » dans leur apparition successive. Vous l’avez compris, Spiral Dynamics propose un système ouvert et ne grave dans le marbre aucun méta-système comme étant l’achèvement ultime du développement humain. D’ailleurs, après VERT apparaissent les v-mèmes JAUNE et TURQUOISE. D’après les auteurs, VERT est le dernier des v-mème de subsistance – c’est à dire que les groupes et les individus y cherchent encore un moyen de pérenniser leur survie, même si c’est en répartissant les richesses et en prenant soin des dominés. JAUNE marquerait l’entrée dans une ère de méta-systèmes dit « existentiels ». Souhaitant vous proposer une quantité d’information raisonnable et digeste – cet article frise les 9 000 mots ! – je traiterai JAUNE dans un article dédié, et TURQUOISE après lui. Si vous êtes impatients je vous suggère de vous procurer Spiral Dynamics, mastering values, leadership and change de Don Edward Beck et Christopher Cowan. Sachez cependant que la quantité d’informations disponible sur TURQUOISE, v-mème confidentiel qui concernait 0,1 % de la population mondiale d’après les auteurs, y est minime.
Comprendre la complexité du monde
Présenter les méta-systèmes de valeurs dans leur ordre d’apparition est fondamental d’un point de vue pédagogique, mais manque de subtilité. D’une part, les transitions entre deux v-mèmes se font par étapes, et d’autres part le monde globalisé qui est le nôtre a redistribué les cartes avec complexité. Avant la révolution industrielle britannique les influences entre les cultures se faisaient plus lentement. Elles existaient quand même, les croisés important par exemple les moulins à vents qu’ils avaient pu observer en orient, mais aujourd’hui un smartphone conçu dans la Silicon Valley va être fabriqué en Chine et disponible en Europe comme en Afrique, le tout dans un laps de temps très court. S’en suit une (relative) uniformisation technologique et une interconnexion informationnelle qui masque en partie les divergences de fond. Un chef de guerre africain (violet/ROUGE ou ROUGE/bleu selon les cas) utilise des technologies militaires apparues postérieurement à la révolution industrielle (ORANGE). Après une catastrophe écologique, une entreprise ORANGE dont la finalité est le profit à court terme essaye de redorer son image à coup de greenwashing pour séduire le VERT présent dans une frange de l’opinion publique. Une partie de la jeunesse défavorisée des métropoles occidentales voit le consumérisme ORANGE titiller son besoin ROUGE de satisfaction immédiate (irritation résumée par Despo Rutti en ces termes : « on parle pas des dernières Nike à un cul-de-jatte »). Face à cette violence ROUGE, les citoyens évoluant avec un prisme BLEU ne comprennent pas que la pauvreté justifie le trafic de stupéfiant (comme le disaient mes grand-parents lepénistes : « nous étions pauvres et portant nous n’avons jamais volé »). Des « antifascistes » drapés dans un VERT de surface expriment leur ROUGE en commettant des violences au nom d’un dogme BLEU. Les social justice warrior VERT rationalisent le communautarisme VIOLET de populations n’ayant pas intégré ORANGE tandis que les militaires évoluant en BLEU s’inquiètent des tentatives de rationalisation ORANGE de l’armée ménées par Sarkozy et ses successeurs. Et pendant ce temps la Corée du Nord, enfermée dans une dictature BLEU par une dynastie aux relents de ROUGE menace de s’effondrer sur elle-même en emportant ses voisins dans le chaos. A 2 000 kilomètres de là, Hong-Kong (ORANGE) veut à tout prix éviter de régresser en BLEU sous le joug chinois…
Cette liste non-exhaustive a pour but de vous faire toucher du doigt l’enchevêtrement des v-mèmes à l’échelle planétaire et à l’échelle nationale. Une situation explosive, dont un des risques est brillamment énoncé par Cowan et Beck en ces termes :
« Only slightly less frightening is the vision of fixation in the D-Q/E-R/F-S [BLUE/ORANGE/GREEN] societal complex. This might resemble Georges Orwell’s 1984, with its tyrannical, manipulative government glossed over by a veneer humanitarian-sounding double-think and moralistic rationalization, and is a very real possibility in the next decades. »
Spiral Dynamics et développement personnel : ma vie, mon nœud
L’enchevêtrement des méta-systèmes de valeurs se manifeste aussi à l’échelle individuelle. Si je n’avais pas un minimum de BLEU je n’aurais passé six longues années à l’université, et si je n’avais pas un minimum d’ORANGE je n’aurais pu créer Hors Norme et Accomplis. Ayant grandi dans une famille dysfonctionnelle, mon VIOLET se limite à la consommation de films fantastiques tels Star Wars ou Harry Potter mais c’est mon ROUGE qui sert d’assise à l’ensemble de mes v-mèmes. Pendant longtemps, la tribal safety n’existait pas pour moi. Ce n’est qu’au cours des dernières années que j’ai pris conscience que mon entourage amical serait là en cas de besoin. Conséquence de mon ancrage en ROUGE, j’ai une forte ambivalence envers BLEU : ce v-mème a été mon horizon autant que ma prison pendant longtemps. Je le rends responsable du retard que j’ai pris dans mes projets d’émancipation par l’entrepreneuriat (je n’ai créé ma première entreprise qu’à 33 ans). C’est pour cela que la lecture de La semaine de 4h a été une libération ORANGE pour moi, bien que je ne sois pas dupe des nombreuses techniques de manipulation appliquées depuis un prisme ORANGE dans le milieu des web entrepreneurs. Considérant que l’argent doit être au service de l’humain, je n’ai pas de problème avec l’idéal VERT de bien-être collectif, mais mon bouillonnement de ROUGE et ma rationalité ORANGE s’accordent mal du dogmatisme BLEU/VERT et du chantage aux privilèges exercés en mode « culpabilisation » par certains social justice warriors. Promis, nous parlerons bientôt de JAUNE. Et vous, ils ressemblent à quoi vos méta-systèmes ?
14 réflexions au sujet de « Spiral Dynamics : décoder le monde (et changer de vie) »
J’ai enfin lu l’article… Merci Frédéric, c’est excellent. Je n’avais pas beaucoup entendu parler de Spiral Dynamics, c’est une lecture intéressante.
Quelques questions si tu as le temps de me répondre :
1/ Comment est-ce que tu classifierais Trump / Clinton par exemple ?
Trump est Orange avec un programme bleu / Hillary Orange avec un programme Orange /vert ?
2 / Comment est-ce que tu classifierais des philosophes romains comme Sénèque et Marc-Aurèle, qui vivent à une époque violet/rouge (?) mais présentent des idées individualistes qui appartiendraient à… Orange sans le matérialisme ?
Merci Stan ! Je suis ravi si tu as découvert des choses à travers cet article.
1/ Pour ce qui est de Trump et Clinton je ne connais pas le détail de leur programme. Je parlerais donc de leur frame marketing (tellement de gens votent sans connaître les programmes héhé) qui est telle que tu la décris : BLEU/ORANGE pour Trump, avec le patriotisme BLEU « make america great again » et l’accent mis sur la prospérité individuelle ORANGE tandis que Clinton mettait en avant les droits des minorités dans une approche VERT (sans renier ORANGE évidemment). Au niveau individuel tu peux également noter le ROUGE bien présent chez Trump, un ROUGE en synergie avec son ORANGE.
La popularité de Trump correspond probablement à ce que les auteurs appellent le GAMMA TRAP, dont la France a connu un exemple flagrant avec la « Manif pour tous » (qui bien évidemment n’est pas du tout « pour tous »). En France plein de gens sont plutôt BLEU/orange (d’où la survivance du communisme dans notre pays). Du coup le grand coup de VERT du mariage homosexuel a poussé ces personnes qui n’ont pas totalement intégré ORANGE à s’arc-bouter sur leur BLEU. Note qu’aux USA on peut imaginer qu’après le backlash BLEU/ORANGE de Trump on assiste à une poussée de VERT, l’hooliganisme politique des uns nourrissant l’hooliganisme politique des autres.
2/ Pour les philosophes je ne peux absolument pas te répondre, n’ayant jamais été friand de philosophie « académique ».
Article et sujet interessant, mais une chose me manque personnellement : pourquoi adhérez-vous à ce système ? Avez-vous quelque chose qui vous permette de le considérer comme « vrai » ?
Est-il prescriptif ou uniquement descriptif ? S’il est effectivement prescriptif, avez-vous un exemple de choses que ce système à prédit ?
Pensez-vous que ce système est falsifiable ? Si oui comment ? Des experiences (dans le sens donné à ce mots par les sciences humaines) ont-elles étés réalisés dans ce sens ?
Dans tout les cas merci pour la découverte d’un système intéressant, et dans l’attente d’une réponse qui me pousserait à m’y interesser plus en profondeur.
Bonjour,
Commentaire rapide pour dire que c’est surement un des meilleurs articles sur la spirale dynamique que j’ai pu lire. Tout en nuance et en profondeur. Bravo !
Merci Yannick !
Salut, merci pour cet excellent article de vulgarisation d’une ouvre à priori aussi dense ! Je trouve certains points de ce système extrêmement pertinents, mais ai un peu plus de mal pour d’autres.
Je comprends parfaitement les couleurs chaudes en fait, mais ai beaucoup plus de mal à comprendre les couleurs froides.
À commencer par le violet, qui mêle une communautarisme tribal ancestral basée sur la transmission orale, et la crainte des dieux, avec la spiritualité.
Tout de suite, je trouve que ça fait un mélange hétéroclite, j’ai donc du mal à la concevoir comme une catégorie en tant que telle, elle ne suffit pas à elle même.
Là où beige est clair « animal solitaire errant guidée par l’instinct et la pulsion », le rouge est clair « horde animale guidée par l’instinct et la pulsion », l’orange est clair « individu solitaire prosperant en utilisant son intelligence » ; les couleurs froides me sembles des amas chaotiques, hétéroclite, décousu ou illogique dans l’ordre d’apparition et dans leur forme de manifestation. Donc après le violet wtf nous avons le bleu. Pas de soucis de cohérence flagrant pour le coup, mais là où y a un truc qui me dérange, c’est que c’est exactement la même visée idéologique que le vert. Bon pour le coup si, côté dogmatique en plus, ce qui pourrait distinguer les deux.
Par contre dernière choses concernant le vert, pour moi dans la logique, ca devrait être la limite d’un méta système qui pousse les ibdividus à evoluer vers le suivant, et du coup le vert devrait être la mise en commun des richesses, l’intelligence individuelle au service de la prospérité de la collectivité. Excuse moi mais là dedans je ne vois pas bien ce que les minorités oppressées viennent f***tre là dedans ?? L’opression des minorités est la conséquence logique d’un système orange poussé à son paroxisme, oui. Mais c’est pas à coup de pansements qu’on soigne une cause systémique ! C’est comme dire que tu vas sauver le monde en allant faire de l’humanitaire en Afrique distribuer des paquets de riz « et en même temps » accepter le néolibéralisme et le rapt de toutes les richesses planétaires par une poignée d’oligarches. C’est bien, mais ça changera rien. Ou alors peut-être n’ais-je pas bien compris la définition du vert..
C’est une analyse très intéressante. De manière générale, je ne me reconnais dans aucune couleur (ou pour être plus exact, comme tu l’as dit, j’estime que chaque couleur dépend du contexte. Je peux parfaitement revêtir la couleur rouge si le besoin s’en fait sentir même si j’ai plutôt un sentiment générale lié à vert et la quiétude de violet, bleu étant beaucoup trop naïf et idéaliste en sachant que par essence, orange ne peut vivre qu’aux dépends des autres, il ne peut subsister lui-même).
Le problème du monde humain est surtout qu’on est dans un monde hétérogène par nature… Si on reprend les couleurs, ayant des niveaux d’évolutions différents et les gens n’évoluant ni au même moment ni à la même vitesse font qu’il y a des cohabitations (jusqu’à l’impossible). Et dans ce cas, les couleurs à vocations pacifistes ne peuvent véritablement exister car elles se font bouffer par les autres.
C’est un peu la même logique au final que « les temps difficiles font les hommes forts=> les hommes forts font les temps de paix => les temps de paix font les hommes faibles => les hommes faibles font des temps difficiles ». Il y a toujours des cohabitations impossibles qui se règlent par la loi « du plus fort » faisant disparaître les formes plus « faibles » jusqu’à réobtenir une cohabitation et non plus une lutte de territoire.
Cela entraîne l’humain dans une boucle sans fin car les couleurs qui survivent garderont toujours leur part « reptilienne » de survie mais avec leur niveau maximal d’évolution (à savoir la tendance orange) car vert n’est qu’une tolérance de orange pour son instrumentalisation dans d’autres mouvances. Et quand orange est globalisé, il s’effondre de lui-même car sa prédation devient similaire à rouge… Les dégâts qu’il a fait dans sa phase orange font que contrairement à rouge, l’environnement est beaucoup moins clément (car rouge reste sur du primaire, la possession
de l’existant tandis que orange est dans la conversion, appauvrir pour s’enrichir en drainant pour créer), il y a une grave régression du système (si tant est qu’on oblitère pas l’espèce…)
Bref, pour résumer, j’attend de voir jaune ou turquoise. En ce qui me concerne, je pense vraiment avoir toutes les formes (sauf orange) selon la situation mais qu’en finalité, même si le potentiel humain est semble t-il illimité. Dans les faits, sa propre limite sera des formes moins évolué de lui-même en cohabitation causant un « maximum » de niveau d’existence. J’en suis profondément triste mais c’est la finalité de l’égo (et sachant que l’égo est le moteur de développement de l’humain…).
Merci d’avoir évoqué ses notions, cela me permet de regarder mes propres analyses et réflexions du monde sous de nouvelles perspectives (mais bon, c’est le but de la réflexion et de la culture après tout).
Super article. J’avais jamais entendu parler de cette théorie
Merci Nicolas.
Oui, la théorie n’est pas très connue, ni en France ni aux USA d’ailleurs. Un vrai paradoxe au regard de sa pertinence.